INSTRUCTORS:
Soulez Guillaume
PR Université Sorbonne Nouvelle - membre titulaireCategories
Programmes de rechercheNé en 1910 et mort en 1995, Pierre Schaeffer est une figure centrale de la pensée du XXe siècle sur la radio, le son et la musique, l’audiovisuel et la communication. C’est aussi un écrivain, un créateur dans le champ de la radio, de la musique, du cinéma, de la télévision…, un essayiste, et un concepteur et fondateur d’institutions, de Jeune France à l’Ina (Brunet et Dallet, 1997 ; Soulez, 2005 ; Tournet-Lammer, 2006 ; Ferenczi, 2010 ; Le Bail & Kaltenecker, 2012 ; Denis, 2022…) en passant par le Studio d’Essai (devenu Club d’Essai), le GRM et le Service de la Recherche. L’année 2025 correspond aux trente ans de la mort de ce pionnier et aux cinquante de la naissance de l’Ina, or il n’existe pas de site de présentation un tant soit peu cohérent de l’ensemble de ses recherches et réalisations, notamment en raison de la polyvalence de celles-ci.
Outre la « découverte » de la « musique concrète » et la pensée du son qui ont fait sa notoriété internationale, Schaeffer est très tôt au fait de l’évolution des médias au niveau international via des missions dans les années 1950 et la création de la SORAFOM et du Studio-Ecole de Maison-Lafitte (pour former les futurs cadres des radios africaines), il est au carrefour entre les chercheurs anglo-saxons, allemands et italiens (via l’Unesco, le Prix Italia, les conférences du Club d’Essai qui accueillent A. Moles ou Lazarsfeld, les échanges et les coproductions avec Mac Luhan, l’ONF et Radio-Canada) et en contact serré avec les chercheurs français (notamment Rouch, Morin, Duvignaud, Levi-Strauss, Friedman, Barthes, le CECMAS et la revue Communications, etc.). Synthétisé en partie dans Machines à Communiquer (1970, 1972), il a produit une théorie originale des médias qui donne de façon pionnière une place clé au public (via une pensée de l’écoute, du dé-conditionnement et du feed-back), à la technique (via sa pensée des « arts-relais » formulée dès les années 1940 et jusqu’aux théories de l’usage et des réseaux mises au point en lien avec Yves le Gall et Jacques Perriault), aux professionnels ou « médiateurs » (dès 1967 avec la première formule du « triangle de la communication »), aux organisations et institutions dans le domaine de la culture et des médias (de la fondation permanente d’institutions originales à l’analyse interne de l’ORTF, en passant par la participation au premier Haut conseil de l’audio-visuel). Ce site vise donc à couvrir le plus possible de domaines de son activité et à permettre de prendre la mesure de cette aventure intellectuelle et institutionnelle de premier ordre, de permettre une montée en compétence des visiteurs et de fournir des outils pour penser les industries culturelles du son et de l’image de demain.
En lien avec l’Association 1901 Pierre Schaeffer, un héritage actuel, soutenue par un comité de parrainage illustre, le projet est d’offrir au grand public, aux enseignants (de musique, cinéma, audiovisuel, nouveaux médias…), aux artistes, aux professionnels des industries culturelles et de leurs archives, et aux chercheurs un site accessible mais sur une base scientifique. L’entrée est biographique mais suit la perspective tracée par Giovanni Levi d’une « biographie modale » qui permet d’explorer des contextes à travers des acteurs historiques (1989) et les rédacteurs des notices sont tous des spécialistes de tel ou tel aspect de la pratique et/ou de la théorie de Pierre Schaeffer. C’est donc un outil de diffusion et de partage entre chercheurs et public, et entre chercheurs, c’est aussi un outil de pensée dans la mesure où le travail de Pierre Schaeffer est proprement multi-disciplinaire, « en spirale », comme il le dit lui-même (Schaeffer, 1970), et la mise en relation des différentes facettes de Schaeffer a une vertu heuristique, que les deux responsables du projet ont déjà pu éprouver à plusieurs occasions. La coordination du site est assurée par Guillaume Soulez (Sorbonne Nouvelle, IRCAV).
Permettant de réunir la communauté des chercheurs sur Pierre Schaeffer et d’envisager une série de premiers enjeux, dont l’hébergement pérenne par Huma-Num d’ores et déjà obtenu, un brouillon de site (Banc d’essai pour un site Pierre Schaeffer) a été financé par une aide de la Sorbonne Nouvelle (SO-SAPS – Science Ouverte, Science avec et pour la société, année 2023, appel MENSR 2022), il sert à montrer à quoi le site envisagé pourrait ressembler, notamment du point de vue du rubricage envisagé (une centaine de notices). L’Ina a accepté de fournir gracieusement des images pour ce site qui demeure réservé aux responsables du projet, aux rédacteurs et aux partenaires, l’IMEC de même (choix d’archives en cours avec une post-doc ayant travaillé sur le fonds Schaeffer à l’IMEC). Un premier conseil scientifique a été constitué pour le site. L’IRCAV a également financé certains éléments.
Prolongeant des recherches commencées au sein du projet Innov’zone, une amorce du site par un webdesigner professionnel sera en travail en 2024 grâce à l’apport du LabEx ICCA et le concours d’Olivier Thévenin (Sorbonne Nouvelle, CERLIS). Ce soutien du LabEx sera l’occasion d’approfondir la pensée de Schaeffer sur la théorie de la communication, les institutions de l’audiovisuel et les industries culturelles.
Outre l’Association Pierre Schaeffer, un héritage actuel, la Direction du Patrimoine de l’Ina et le GRM, le montage du projet se fait en partenariat avec IMEC, l’association Phonurgia Nova (association sur la recherche sonore soutenue par le Ministère de la Culture depuis 1983), ainsi que d’autres partenaires avec lesquels les contacts sont en cours (revue Esprit, SACEM…).
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Comité de parrainage :
Jean-Michel Jarre, Jean-Noël Jeanneney, Jack Lang, Michaël Levinas, Pierre Mazeaud, Edgar Morin, Basarab Nicolescu.
Références citées :
– Sophie Brunet et Sylvie Dallet, Pierre Schaeffer, un itinéraire en recherche/A Career in Research, CERPS, 1997.
– Sébastien Denis (dir.), Des mondes possibles. Le Service de la recherche et l’animation, Ina éditions, 2022.
– Thomas Ferenczi, « Pierre Schaeffer inspirateur de la création de l’Ina », in E-Dossier de l’Audiovisuel, Pierre Schaeffer, quel héritage ?, Ina, 2010.
– Anne-Marie Laulan et Jacques Perriault (dir.), Hermès, n° 48, Racines oubliées des sciences de la communication, CNRS Éditions, 2007.
– Karine Le Bail & Martin Kaltenecker (dir.), Pierre Schaeffer, les constructions impatientes, CNRS Éditions, 2012.
– Giovanni Levi, « Les usages de la biographie », Annales. Économies, sociétés, civilisations, 44e année, n° 6, 1989, pp. 1325-1336.
– Pierre Schaeffer, Machines à communiquer, Seuil, 1970 et 1972.
– Pierre Schaeffer, L’Avenir à reculons, Casterman, 1970.
– Guillaume Soulez, « Parole captée, parole capturée : de Pierre Schaeffer aux années 70 », in François Jost (dir.), Années 70. La télévision en jeu, CNRS Éditions, 2005.
– Guillaume Soulez, « Télévision et esprit de recherche : rouvrir les dispositifs » in E-Dossier de l’Audiovisuel, Pierre Schaeffer, quel héritage ?, Ina, 2010.
– Guillaume Soulez, « Dispositif, médium, média. Pour une analyse scalaire du « cinéma éclaté » avec Pierre Schaeffer » in Le Cinéma éclaté. Formes et théorie (G. Soulez dir.), Cinémas, 29 (1), Montréal, 2018, pp. 67-87.
– Jocelyne Tournet-Lammer, Sur les traces de Pierre Schaeffer. Archives 1942-1995, Paris, Ina-La documentation française, 2006.