Chantal Duchet (1951-2016)

Chantal Duchet (1951-2016)

 

Hommage de Guillaume Soulez, pour le département Cinéma et Audiovisuel, le mardi 5 avril 2016

« Chantal Duchet, Professeur au Département Cinéma et Audiovisuel de l’Université Sorbonne Nouvelle – Paris 3, est décédée dimanche 27 mars 2016 à l’âge de 65 ans, après avoir montré un courage hors-norme face à la maladie. C’est une personnalité particulièrement dynamique et attachante qui nous quitte, comme nous le disent aussi les témoignages que nous recevons de ses collègues de toute l’Université, de ses contacts professionnels et de ses étudiants.

Élève-professeur (IPES, de 1973 à 1977), Chantal Duchet entreprend des études d’arts plastiques à Paris 1 (Maîtrise en 1976, DEA en 1977, Capes en 1978) en cumulant, déjà, une formation théorique en esthétique et théorie de l’art avec un ancrage dans le monde professionnel (BTS d’arts appliqués en publicité à l’École Duperré en 1974), jusqu’à une thèse sous la direction de Bernard Teyssèdre intitulée « Codage et décodage de l’image photographique dans le mailing » soutenue en 1983.

Elle est recrutée comme Maître de conférences à partir de 1984/85 au sein de l’UFR Cinéma et Audiovisuel (ancêtre de notre département) où elle développe des enseignements sur la télévision, la publicité, les « nouvelles images » (images de synthèse) et plus récemment sur les contenus audiovisuels sur le web et le téléphone mobile, tout en demeurant conceptrice free lance de spots publicitaires (notamment conceptrice graphique), conceptrice de CD- Rom sur l’histoire de la publicité (avec l’INA), rédactrice de rapports d’études ou d’expertise dans le domaine (couleur pour la RATP, dispositifs de filmage du sport pour Eurosport, évolution des marchés audiovisuels, placement de produit dans le cinéma et la télévision)… Elle soutient en 2004 une habilitation à diriger les recherches au titre évocateur : « L’image et ses applications industrielles, histoire d’une appropriation », puis elle est élue Professeur en 2006.

Chantal Duchet s’est fortement investie dans la vie institutionnelle, pour représenter le département, qu’elle a dirigé en 2011, ou au sein de la section « Sciences de l’information et de la communication » du CNU. Membre de la CFVU, du Conseil académique et du Bureau de notre université, elle a ainsi pendant toute sa carrière été élue dans de nombreuses instances : membre du CEVU de 1986 à 2001, du Conseil d’administration de 2002 à 2004, de la commission du budget de 1987 à 2007, de la commission des structures depuis 2011, etc.

Au moment où se développait, dans les années 1980, l’UFR Cinéma et audiovisuel, autour d’une équipe de collègues, souvent amis (Michel Marie, Jacques Aumont, Roger Odin, Michèle Lagny, Laurent Creton…, et bien d’autres), sa « double casquette » d’universitaire et de professionnelle de la publicité a contribué à façonner l’identité de notre département. Chantal Duchet ne manquait jamais de rappeler, en cours, en séminaire comme en colloque, de façon à la fois directe et précise, comment les règles de la communication publicitaire ou du placement de produit déterminaient strictement l’ordre graphique, ou le déroulement logique et narratif des séquences audiovisuelles (qu’il s’agisse de parfum, de voiture ou de vêtement).

Soucieuse de nous faire voir l’envers des images – qui était l’endroit pour elle – elle avait su également, entre autres exemples, montrer l’importance de la publicité avant la publicité: le rôle des «émissions compensées » dans les années 1960 avant l’instauration officielle de la publicité en octobre 1968. Témoins de sa perspective très originale articulant analyse formelle et économie, ses publications attestent aussi son humour : ne concluait-elle pas ainsi un article sur vingt années de publicité télévisuelle, avec une jolie pointe : « Utopie ? Pourquoi pas ? La publicité n’a-t-elle pas essentiellement pour rôle de proposer des utopies ? » (Communications, n° 51, pp. 153-174). Son savoir professionnel permettait ainsi un autre regard sur les images et une mise en contexte permanente des dernières évolutions du cinéma et de l’audiovisuel, en conservant un œil sur les parcours professionnels des créateurs, producteurs et managers du secteur. Tout en taquinant ainsi ses collègues, elle a fait profiter ses meilleurs étudiants de ses réseaux dans la profession.

Dans l’orchestre de notre département, la partition originale de Chantal était très précieuse, elle nous manquera.À sa famille, à ses amis, à tous ceux pour lesquels elle a compté, nous adressons nos condoléances les plus vives. »